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Marion V
Greffe réussie d’un patch cellulaire dans la rétine, une première en France !
En décembre 2017, une équipe de chercheurs français a réussi une première greffe de cellules dérivées de cellules souches permettant de régénérer certaines cellules de la rétine et ainsi empêcher la perte de la vision. Si l’expérimentation a eu lieu sur des rats atteints de rétinite pigmentaire d’origine génétique, cette avancée majeure en matière de thérapie cellulaire en France est particulièrement porteuse d’espoirs. En effet, elle pourrait à terme apporter des réponses aux patients chez qui l’on observe une altération de l’épithélium pigmentaire rétinien, notamment les personnes atteintes de DMLA. Pour mieux en comprendre les tenants et aboutissants, nous avons interrogé l’un des membres de cette équipe, le Dr Olivier Goureau, directeur de recherche Inserm à l’Institut de la Vision.
Vous venez de réaliser le premier essai français de thérapie cellulaire pour une forme de rétinite pigmentaire chez le rat : pouvez-vous nous en dire plus sur l’expérimentation que vous avez menée ?
Précisons tout d’abord que cette expérimentation est le fruit d’un important travail collaboratif entre une équipe de chercheurs d’I-Stem, le laboratoire créé par l’AFM-Téléthon, l’université d’Evry et l’Inserm, sous la direction du Pr Christelle Monville*, mon équipe à l’Institut de la Vision ainsi qu’une équipe de l’hôpital Saint-Louis qui utilise déjà des membranes amniotiques pour réaliser des greffes chez l’homme. Dans le cadre de la rétinite pigmentaire d’origine génétique, notre idée a été de faire un nouveau produit de thérapie cellulaire afin de remplacer les cellules déficientes de l’épithélium pigmentaire rétinien responsables de la mort des photorécepteurs, cônes et bâtonnets, en charge de la vision. Celles-ci sont bien connues car leur dysfonctionnement est également responsable de la DMLA, la dégénérescence maculaire liée à l’âge, qui touche plus d’1,5 million de personnes en France et concerne une personne sur deux à partir de 90 ans. Plutôt que d’injecter dans l’œil des cellules de l’épithélium mises en suspension, notre projet a consisté à créer et transplanter un patch de cellules déjà fonctionnel. Pour le réaliser, nous avons dans un premier temps différencié des cellules souches embryonnaires humaines en cellules épithéliales de rétine, par un procédé compatible avec une production clinique, et les cellules produites ont été disposées sur une membrane amniotique humaine - ce type de membrane est déjà utilisé pour les greffes de cornée. Nous avons ensuite mis l’ensemble dans de la gélatine puis l’avons découpé en petits carrés - afin de former des patchs de cellules - que nous avons greffés sous la rétine des animaux. Il s’agissait en l’occurrence de rats atteints de rétinite pigmentaire d’origine génétique.
Photo DR I-Stem © Karim Ben M'barek
Quels résultats avez-vous obtenus ?
Nous avons pu constater que ce patch cellulaire fonctionnait bien mieux que l’injection de cellules mises en suspension : il présentait de meilleures performances visuelles, durait plus longtemps et protégeait une plus grande surface de la rétine. Cette expérimentation marque donc une avancée majeure en termes de thérapie cellulaire puisque nous sommes aujourd’hui capables de réaliser des patchs cellulaires, d’empêcher la mort des photorécepteurs et ainsi prévenir la perte de vision.
Quelles sont les prochaines étapes de cette expérimentation ?
Aujourd’hui, des études d’innocuité et de sécurité sont réalisées sur d’autres animaux. Les macaques notamment ont l’avantage d’avoir une anatomie de l’œil proche de celle de l’œil humain avec notamment la présence d’une macula, cette région sous laquelle nous allons greffer notre patch cellulaire. Des études sont donc actuellement en cours pour transplanter ce patch sous la rétine de macaques afin de montrer que ce pansement cellulaire n’est pas dangereux. Et les retours des premières études sont positifs. Début 2019, nous allons déposer un dossier à l’ANSM, l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, pour le développement d’un produit de thérapie innovant et nous pourrons alors recruter les premiers patients. A priori, entre six et douze patients atteints de rétinite pigmentaire seront retenus pour ce premier essai clinique de phase I/II. Il s’agira alors du premier essai de thérapie cellulaire pour des maladies de la vision en France (Hôpital des Quinze-Vingts).
Du point de vue des patients justement, quels espoirs peuvent-ils tirer de ces nouvelles avancées de la recherche ?
Il est essentiel de rappeler que tous les patients ne pourront en bénéficier. Cette nouvelle thérapie s’adressera exclusivement aux patients qui présentent une altération de l’épithélium rétinien et à qui l’on peut encore greffer de nouvelles cellules, c’est-à-dire des patients qui n’ont pas perdu leur photorécepteurs avec une vision résiduelle. Il s’agira donc de patients atteints de certaines formes de maladies génétiques rares (rétinites pigmentaires) avec des mutations dans des gènes spécifiques de cet épithélium pigmentaire. Il devrait être possible d’appliquer plus tard cette nouvelle thérapie aux patients atteints de DMLA.
Christelle Monville, professeur à l'université d'Evry et chercheuse à I-Stem.
*Christelle Monville et son équipe de recherche à I-Stem travaillent depuis six ans sur la génération de cellules de l'épithélium pigmentaire à partir de cellules embryonnaires humaines dans des conditions applicables à une production clinique d'un médicament de thérapie innovante pour la thérapie cellulaire.
Photo © AFM-Téléthon.
Dr Olivier Goureau
DR2 INSERM à l’Institut de la Vision, Paris.
Chef d’Equipe - Développement et régénération de la rétine.
© Institut de la Vision
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